Patricia Loison au pays des sumos
Dans l'arène des grands soirs
La présentatrice de France 3, Patricia Loison, installée au Japon avec sa famille, a vécu en mars son premier tournoi de sumo, au Edion Arena d'Osaka. Un grand moment de folklore dont elle livre son récit et ses impressions pour Vivre le Japon !
Lesgrains de sel jetés avec légèreté par une main de géant… Le balai à longs poilsdessinant une arabesque sur le dojo, l’arène circulaire des combats… Mêmel'arbitre ressemble à une marionnette d'apparat… tout en soie, dorures etceintures… L'incontournable sens du détail des Japonais jusque dans les tournoide sumos !
J'étaisloin d'imaginer ce raffinement… dans un gymnase!
Quandl'Homme m'annonce des semaines plus tôt que nous sommes invités au grandtournoi d'Osaka… je cache à peine ma joie…
D'énormesJaponais, bourrelets en cascade… luttant en string …? Non, vraiment, merci…je reste sur la saison 5 de Scandal…
Plutôtla Maison-Blanche et son fringant président,
Queces gros bonhommes à chignon…
"Maisc'est un événement ! C'est rare de pouvoir y assister ! s'emballe mamoitié, c'est une passion japonaise… un sport national… une traditionséculaire !"
Ok…ok…ok !
Tout le monde cherche les stars… Facile ! Ils dépassent tout le monde d'une ou deux têtes… et se baladent en peignoir…
Nousy voilà donc, en famille… au coeur de Namba, l’un des – nombreux – quartiersd’Osaka qui ne dort jamais… mosaïque de cantines, de restaurants, d’enseignespopulaires…
Autourdu grand complexe sportif, l'ambiance monte.
L'atmosphèrebon enfant me gagne, je baisse ma garde.
Fanions,barils de saké, les familles, les groupes de fans, les solitaires, sepressent…
Toutle monde cherche les stars…
Facile!
Ilsdépassent tout le monde d'une ou deux têtes… et se baladent en peignoir…
Onpénètre dans le dédale. Je me surprends à crier : "Là, là !!"
Quandon aperçoit un des immenses combattants fendre la foule dans lescouloirs…
Monmari sourit …
Nousne sommes pas dans les loges préférées des Japonais : ces petits carrés oùchacun enlève ses chaussures… pique-nique… attrape une glace…s'allonge, voirepique une petite sieste…
Nosplaces sont à l’occidentale, sur des chaises… tout de suite moins confortables…
Autour, pas mal d'étrangers comme nous… curieux du spectacle…
Onnous explique les deux divisions – Makuuchi et Juryo… – les talentueux Maegashiraet les vénérés Yokozuna – quatre seulement ! – la progression du tournoi, latension palpable jusqu'à l'affrontement final.
Maisles filles et moi, groupies dans l'âme ,on veut du combat : de l'attrapage de mawashi – la bande de tissu serrée autour de la taille etde l'entrejambe – de l’empoignade.
Entre deux chocs de titans, le cérémonial se déploie.
Les Japonais adorent ça !
Maisd'abord, surprise !
Cesmasses qui dépassent tous la tonne etdemie se muent en danseurs de ballet : pliés, jetés de jambes, taille qui plie sur le côté… Unegrâce étonnante ! Les filles concèdent qu'elles-mêmes n'arriveraient pas àrester aussi longtemps dans cette position de grand plié, au ras du sol.
Etle combat dans tout ça, me direz-vous…?
Patience!
Entredeux chocs de titans, le cérémonial se déploie.
Les Japonais adorent ça !
Lescouleurs des entreprises sponsorisant les plus forts paradent autour du ring rond.
Lessumos eux-mêmes font le show.
S'accroupissent… prêts à bondir…
Lepublic retient son souffle…
L'instantd'après, les lutteurs se ravisent… repartent qui en fronçant lessourcils, qui moulinant des bras… de son côté.
Lafoule gronde et rit à la fois…
Autourde nous, des spectateurs japonais crient les noms de leurschampions.
C'estbien la première fois depuis notre arrivée que je vois nos hôtes nippons selâcher à l'européenne !
Çacrie, ça rit, et ça hue aussi.
On retient notre souffle quand un sumo s'effondre sur une petite mamie du public…
Quandun combattant – qui n'est pas nippon – sort son adversaire par une fine esquive…obligeant l'autre à finir en galipette et plonger hors du ring.
"Celui-là est Géorgien", me précise mon mari au combat suivant (il a googlisé tousles joueurs du programme pour reconnaître leurs visages – sérieusement…???!!!)
"etil affronte un Japonais", poursuit mon érudit époux, insensible à monironie.
Ah…là ça me parle…
Lesfilles et moi, on parie…
Quiva gagner… le Géorgien ou le local ?
Onmise toutes déloyalement sur l'envahisseur balkanique… et on applaudit à toutrompre quand après une empoignade en bonne et due forme pendant de longuessecondes de reculades d'un bord du tatami à l'autre…le Japonais finit par tomberhors du cercle… perdu !
Onretient notre souffle quand un sumo s'effondre sur une petite mamie du public…
Plus de peur que de mal, mais ça arrive, nousdit-on ! Sport dangereux pour les fans !
Finalement,je les trouve touchants ces sportifs qui remettent leur titre ou leur sort enjeu en quelques secondes car ça va très vite !
Etqui se saluent toujours avant de se retirer du ring.
Combiendoit-on manger pour arriver à ce poids-là ?
Lapression sur les articulations… brrrr…
Ensortant, nous n'avons qu'une idée en tête, en approcher un… et immortalisernotre journée avec une photo!
Nousrejoignons les passionnés à la sortie des vestiaires – si on m'avaitdit…!
Ontrépigne, on attend…
Quandun peignoir bien plus large que la moyenne se profile, mon aînée n'hésite pas:
"Sumimasen,for the French media…" (rien que ça !)
Etle très imposant sumo d'accepter de prendre la pose avec nous.
A-t-il perdu, a-t-il gagné ?
Nousne le saurons pas.
Sonvisage est impassible.
Ilmarche vers la sortie.
Latête bien au-dessus de la mêlée.
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